D’avoir en préalable à la concertation choisi une solution préférentielle (celle de construire un incinérateur de 110000 tonnes sur la même parcelle à Beaubreuil) et développer longuement ce choix dans les documents de la concertation ne fausse-t-il pas le débat ?
A l’atelier du 4 octobre à Panazol portant sur les enjeux sanitaires et l’impact du projet on nous a expliqué que l’impact sanitaire des incinérateurs était négligeable : pour les 114 incinérateurs, les différentes molécules contrôlées représentent entre 00,1% et 2% de l’émission de ces molécules au niveau national.
Justement, si les molécules émises par les 114 incinérateurs sont quantifiables sur les dizaines de milliers de sources émettrices, cela ne veut-il pas dire que mathématiquement au niveau de chaque incinérateur les émissions sont importantes ?
Comment avez- vous déterminé l’impact sanitaire passé sur la population de Beaubreuil, du Palais sur vienne et de Rilhac Rancon située directement sous les retombées de fumées de l’incinérateur ?
(de 1989 à 2005 les rejets de l’incinérateur étaient très mal contrôlés, de 2005 à 2014, une amélioration a été apportée dans les contrôles, mais toujours insuffisante concernant des molécules cancérigènes comme les dioxines , les oxydes d’azotes…, à partir de 2014 et en 2022 une nouvelle série de contrôles plus stricts est imposée).
Pendant tout ce temps qu’en est-il de la santé des 30 000 habitants qui ont vécu sous le champignon ?
Pourquoi n’y a-t-il eu aucune réponse à cette question lors de l’atelier du 4 octobre à Panazol portant sur les enjeux sanitaires, malgré la présence d’une responsable de l’ARS ( Agence Régionale de Santé).
Cette population , notamment celle de Beaubreuil déjà victime d’une pollution routière et de la zone industrielle Nord ne doit-elle pas être epargnée?
Devant l’absence de données chiffrées concernant l’état sanitaire de cette popuation ( Beaubreuil, Le Palais sur vienne et Rilhac Rancon) le principe de précaution ne doit-il pas s’appliquer et ne pas implanter le nouvel incinérateur à Beaubreuil?
Merci pour vos questions. Sachez tout d’abord que nous avons parfaitement conscience des questionnements qui peuvent émerger autour des questions de santé liée à l’incinération et c’est notamment pour cela que nous avons organisé un atelier spécifique sur le sujet en présence d’experts reconnus et indépendants.
Comme cela a été présenté lors de l’atelier sur les impacts du projet le 4 octobre dernier (dont vous pourrez retrouver le compte-rendu dans les prochains jours sur le site internet), il est à signaler que la réglementation sur les déchets a significativement évolué ces dernières décennies avec une diminution très significative par exemple des émissions de particules de -97,1 % et des dioxines de – 99,9%. Sur les particules, les 10 champs d’activités* couvrant l’incinération représentent seulement 0,02 % des émissions en France et 1,30 % pour les dioxines furanes. L’exposition de la population à la pollution atmosphérique est ainsi davantage liée aux secteurs résidentiel et tertiaire ainsi qu’aux transports. C’est le cas pour les riverains de Beaubreuil, comme pour toutes les populations résidant à proximité d’axes routiers par exemple.
En outre, plusieurs études de Santé Publique France** ont démontré qu’il n’y avait pas de différence de concentration de molécules dans le sang entre les populations riveraines d’un incinérateur et les autres. De même une étude très puissante et unique au monde a été réalisée par l’INVS. Cette étude géographique a porté sur 4 départements, 16 incinérateurs (sans traitement de fumées à l’époque), 2.5 millions de personnes entre 1972 et 1985 avec un recensant des cancers apparus entre 1990 et 1996. Les conclusions sont les suivantes : excès de risque faibles (1.06 à 1.23) et à la limite de la significativité par rapport à d’autres facteurs de risque. L’étude ne peut établir la relation de causalité entre l’apparition de cancers et la présence d’une installation d’incinération. Résultats non transposables à la situation actuelle (émissions 100 fois plus faibles). D’après l’InVS, il parait improbable de pouvoir quantifier les impacts des installations actuelles avec des telles études. Par ailleurs, il a été indiqué lors de l’atelier du 4 octobre qu’il n’est pas possible de mener une étude sanitaire spécifique sur une population réduite, en l’occurrence celle des riverains de l’incinérateur. En effet, il faut un nombre plus important de personnes pour déterminer des statistiques robustes.
Si l’un des scénarios devait être mis en œuvre dans les années à venir, l’Entente devrait obligatoirement conduire une étude d’impact incluant un volet sanitaire spécifique incluant le passif (comme Limoges Métropole a pu déjà le faire lors de la mise à jour du volet sanitaire de la Centrale Energie Déchets en 2005 en intégrant les valeurs mesurées pour les années passées et les valeurs limites d’émission de la réglementation de 2002 [hypothèse maximisant] pour les années à venir). C’est sur cette base que les services de la DREAL (appuyés notamment par les services de l’ARS) étudieraient le projet et que l’autorisation pourra être accordée ou non par le Préfet. Les risques sanitaires sont donc bien pris en compte dans le cadre du projet.
Les chiffres présentés lors de l’atelier du 4 octobre visaient à rendre explicite le poids significativement très faible du secteur de l’incinération dans les émissions globales en France. Comme cela a été également présenté par ATMO Nouvelle Aquitaine, dans les mesures réalisées à proximité de la CEDLM, il n’y a pas de spot particulier qui ressorte pour les polluants et les valeurs moyennes annuelles sont basses par rapport au reste du territoire de la métropole. Plus précisément, les points de mesure des dioxines et furanes au niveau de l’incinérateur font ressortir des niveaux en dessous de la médiane. Au global, les mesures révèlent que toutes les émissions sont largement inférieures à la réglementation.
La mesure en continue de la qualité de l’air sur le paramètre particules en suspension PM10 sur la station d’Atmo Nouvelle Aquitaine (Allée Garros au Palais sur Vienne) démontre que les valeurs sont inférieures aux seuils limites. Pour aller plus loin, cette station présente en 2021 les meilleurs résultats des 5 stations disposées en Haute-Vienne.
Source : extrait présentation Atmo nouvelle Aquitaine – atelier du 4 octobre 2022
Source : rapport annuel 2021Atmo nouvelle aquitaine- extrait départemental Haute-Vienne
Les objectifs de la concertation préalable tels qu’édictés par le Code de l’environnement stipulent bien qu’il s’agit de débattre de l’opportunité d’un projet, de ses enjeux environnementaux et socio-économiques, de ses impacts et également des scénarios alternatifs (y compris la non mise en œuvre du projet). C’est dans ce cadre qu’est présenté le scénario préférentiel de l’Entente ainsi que les hypothèses alternatives qui ont été étudiées. Le débat repose donc bien sur 1 scénario préférentiel (dont l’opportunité doit être ou non confirmée à l’issue de la concertation) et des scénarios alternatifs. Ces derniers ont été exposés plus en détail lors de l’atelier du 13 octobre à LIMOGES BEAUBREUIL.
Bien cordialement,
* Incinération des déchets domestiques et municipaux (avec et sans récupération d’énergie), Incinération des déchets industriels (sauf torchères), Incinération des boues résiduelles du traitement des eaux, Incinération des déchets hospitaliers, Incinération des huiles usagées, Incinération de carcasses animales, Incinération associée au traitement des eaux usées dans l’industrie (091001), Incinération associé aux autres mises en décharge de déchets solides et Feux ouverts de déchets agricoles (hors 1003xx)
** https://www.santepubliquefrance.fr/docs/etude-d-impregnation-par-les-dioxines-des-populations-vivant-a-proximite-d-usines-d-incineration-d-ordures-menageres.-rapport-d-etude